
Benjamin Le Masson s'exprime..
1 février 2021
Nous avons eu la chance de nous entretenir Benjamin Le Masson, architecte Voyer en Chef à la Mairie de Paris dans le service aménagement et grands projets. Il a accepté de nous accorder un peu de son temps afin de nous parler du projet de réaménagement de l’Avenue des Champs Elysées prévu pour 2030.
Avec un architecte
Entretien
Quel rôle jouez-vous dans la réalisation d'un projet d'une telle envergure ?
Nous, on travaille sur l’espace public de Voirie. Notre travail, c’est de façade en façade, entre les façades, sur les espaces vides, les trottoirs, la chaussée, des espaces jardins… Moi je fais partie d’un service d'aménagement, donc on est plutôt sur des projets en devenir et sur des opérations de réaménagement de l’espace public, dont celui des Champs Elysées.
Quel a été l'élément déclencheur de ce projet ? Depuis quand est-il à l'étude ?
Le projet était inscrit dans le programme de la candidate qui a été élue maire de Paris, Anne Hildago. Il était envisagé de se poser la question du réaménagement des Champs Elysées sans préciser les réels objectifs, ou en tout cas les localisations. Et puis, parallèlement, pendant la campagne électorale, il y avait aussi une grande exposition réalisée au Pavillon de l’Arsenal, sous l’initiative du Comité des Champs Elysées qui avait commandé une étude, ou plutôt une réflexion, à un groupement de maîtriseurs de PCA-stream, dont l’architecte Chiambaretta. Une fois l’élection passée, la maire de Paris a été élue et la question des Champs Elysées, comme d’autres gros dossiers, est apparue pour voir ce que l’on pourrait réaliser dans les six années de mandature de la nouvelle maire, mais avec des échéances un peu différente suite aux Jeux Olympiques de 2024 qui viennent interférer sur un potentiel calendrier.
Quel rôle jouez-vous dans la réalisation d'un projet d'une telle envergure ?
Nous, on travaille sur l’espace public de Voirie. Notre travail, c’est de façade en façade, entre les façades, sur les espaces vides, les trottoirs, la chaussée, des espaces jardins… Moi, je fais partie d’un service d'aménagement, donc on est plutôt sur des projets en devenir et sur des opérations de réaménagement de l’espace public, dont celui des Champs Élysées.
Le projet initial était censé se terminer avant les Jeux Olympiques de 2024. Finalement, il sera achevé vers 2030. Avoir accumulé du retard avec des travaux omniprésents ne risque-t-il pas d'entacher davantage l’image de cette avenue ?
Oui et non. On peut faire des choses en 2024 qui soient durables jusqu’en 2030. La question, c'est de se demander ce qu’on peut faire d'ici 2024 qui ne serait pas à remettre en cause, qui serait une sorte de premiers travaux qui viendraient s'inscrire dans la vision des Champs Elysées de 2030. Oui, il est vrai qu'il faut avoir un projet global avec une vision globale comme celle proposée par Chiambaretta et le Comité des Champs Elysées, pour pouvoir en effet « phaser » une partie des travaux de 2024. Mais de notre point de vue, cela peut tout à fait s'intégrer dans ce projet. La première étape se ferait en 2024, et puis on aurait des travaux plus lourds et conséquents entre 2024 et 2030.
Qui finance ce projet ? Quelle est la part de responsabilité financière de l'État, la région...?
C'est la ville de Paris qui financerait complètement ces réaménagements, mais la ville réfléchit quand même à faire participer certains opérateurs privés. Ce serait dans le cadre d’études par exemple, ou dans le cadre des terrasses, tout ce qui touche aux concessions privées. Mais globalement, ce serait quand même des participations assez réduites via le Comité des Champs Élysées, par exemple. C'est la ville de Paris qui en serait le premier financeur, d'où la question de phaser dans le temps puisque ce serait des travaux qui coûteraient des dizaines de millions d'euros. Donc forcément, il y aura un phasage, car la ville ne se lancera probablement pas dans un projet à 300 ou 400 millions d'euros, ou en tout cas pas d'emblée. Le phasage sera assez long, et c'est aussi pour cette raison que c’est le terme de vision 2030 qui a été cité.
Pensez-vous qu'une fois abouti, le projet répondra à toutes les attentes environnementales ?
À toutes, je ne sais pas. Les objectifs, il faut déjà les définir. Déjà, il y a l'objectif pour la végétalisation, et on sait que le complément de végétalisation participera à faire baisser le niveau des îlots de chaleur urbains, donc une partie de la chaleur urbaine qui est dans les villes, mais il participe aussi à compléter l'infiltration en pleine terre et à éviter de rejeter dans les égouts les eaux de ruissellement, donc il y a un objectif de végétalisation assez fort. Il y a aussi un objectif de baisser les mobilités, la circulation automobile, c'est un objectif municipal. Donc on peut imaginer une réduction de circulation. On l'avait déjà réduite dans la précédente mandature pour l’implantation d'une piste cyclable. On avait enlevé une file de circulation dans chaque sens, en partie haute et en partie basse des Champs Elysées, et on peut imaginer qu'on continue par la suite. Certains parlent même de piétonnisation ponctuelle : c'est le cas des Champs Elysées qui étaient, avant la Covid-19, réservés aux piétons un dimanche par mois. Donc voilà, le deuxième objectif, c'est la piétonnisation, alternative à la circulation automobile. Il y a un troisième objectif qui concerne les transports en commun : il y a beaucoup de lignes de bus qui circulent sur les Champs Elysées, donc on peut imaginer qu'il y aura, de toute façon, des réflexions sur des matériaux plus infiltrants, ou davantage durables, il y aura forcément un sujet là-dessus, mais aussi sur le mobilier urbain, l'éclairage public, la baisse de consommation électrique… Mais tout ça, c'est un tas d'actions qui s'intégreront dans une rénovation des différents éléments qui composent l’espace public.
La verdure occupera alors une place importante sur les Champs Elysées de 2030, et la circulation des véhicules diminuera donc considérablement. Comment appréhendez-vous la réaction des automobilistes ?
Par rapport aux Champs Élysées et aux riverains, il y a déjà une marge de manœuvre assez importante, car on part quand même d'une voie qui fait 27 mètres de large de chaussée, c'est très large et on ne voit pas toujours ça sur Paris. Donc la réduction de la circulation peut se faire d'une façon cosmétique, sans forcément contraindre la desserte automobile des riverains des Champs Élysées. Après, les touristes, les clients, et les clients potentiels, qu'ils soient touristes ou métropolitains, viennent de moins en moins en voiture faire leurs courses sur les Champs Élysées. Les réflexions sur les grandes avenues à l'échelle mondiale montrent qu'il y a de plus en plus d'avenues qui se piétonnisent, même les grandes avenues les plus emblématiques de commerce. Et elles sont de moins en moins desservies par la circulation automobile. Il n'y a pas trop de problème de desserte et d'accès grâce aux trois ou quatre parkings sur les Champs Élysées, même si on réduit fortement les flux.
Qui dit diminution de circulation dit diminution de pollution. Espérez-vous que cette initiative « eco-friendly » soit prise pour exemple ailleurs à Paris, voire en France ?
C'est sûr que l'avenue des Champs Élysées est mondialement connue, donc forcément cette intervention va avoir un écho largement en dehors de Paris. Montrer que sur les Champs Élysées, on peut en effet ne garder qu'une ou deux files de circulation, cela peut faire école dans d'autres projets, dans d'autres capitales ou d'autres métropoles.